Une question récurrente, posée par beaucoup de photographes : comment faire pour savoir si ma photo ou celle de mon voisin est belle? Comment progresser dans ce regard et donc dans ma pratique photo? Les deux étant liées.
Quelles sont les critères qui me permettront de dire avec « certitude », c’est une bonne photo ?
Je ne pense pas que pour répondre à ces questions, une seule réponse ou plusieurs réponses rhétoriques puissent suffire. En effet, regarder une photo, juger de la qualité d’une photo demande une expérience qui ne peut s’acquérir qu’avec le temps, la pratique, et aussi la sensibilité qui est unique et propre à chaque photographe.
Mais qu’est-ce que signifie la pratique de ce regard?
Pour pratiquer ce regard, on va faire la distinction entre trois moments différents qui concernent chaque prise de vue.
- Avant de me mettre en position de photographier, je vois le sujet que j’ai envie de prendre en photo, et que ce soit de la photo de rue ou une photo de paysage « réfléchie », ou tout autre sujet, il y a toujours ce moment avant, qui dure plus ou moins longtemps, et qui va nous permettre de penser au sujet, à son environnement, à la lumière, etc. Il est évident que pour une photo de rue, on aura moins le temps pour réfléchir, mais d’y mettre l’attention, ne serait-ce qu’1/4 de seconde permettra d’acquérir les bons réflexes. Dans ce premier contact visuel, il y a donc le sujet et son environnement.
- Le deuxième moment, est celui où vous mettez en joue, pour attraper la photo, et là il se passe plein de choses, c’est à dire que vous décidez, de ce que vous allez faire du sujet par rapport à son environnement. Quels éléments vont rester? Lesquels vont disparaître? Comment je vais faire apparaître les éléments qui seront visibles dans la photo? Et donc quelles conséquences cela va avoir sur la perception de la photo?
- Le troisième moment, est celui où vous allez pouvoir analyser votre photo, devant votre écran, et finalement revenir aux deux moments précédents, pour essayer de voir, de ressentir, si vous avez fait le bon choix, et finalement de faire une auto-critique de votre photo, pour vous améliorer à la prochaine prise de vue, afin de mieux concrétiser votre intention.
Cette connaissance devrait déjà vous permettre d’avoir une perception plus subtile de ce qui se passe en vous, lorsque vous photographiez, et pour passer de la pratique à la théorie, je vous propose des exercices pour aiguiser votre regard.
Le premier exercice c’est de prendre votre focale de 50mm pour ceux qui ont un appareil plein format (24×36), ou 35mm pour ceux qui ont des APSC, c’est à dire une focale proche de comment l’œil humain voit. Ceux qui n’ont pas cette focale fixe, peuvent régler leur zoom sur 50mm ou 35mm, suivant le format de leur capteur.
Avec cette longueur de focale, qu’on ne touche plus, et bien pendant 15 jours, on va choisir un sujet par jour et faire une seule photo de ce sujet. Cette photo sera réfléchie, pensée, puisque ce sera l’unique.
C’est comme si on revenait au temps de l’argentique (que je n’ai pas connu), et qu’il faille aller à l’essentiel et ne pas se tromper en gâchant de la pellicule.
Le fait de prendre une focale fixe, va vous obliger, à avancer, reculer, plier ses genoux, monter sur un tabouret…penser à votre photo.
Le deuxième exercice va être d’abandonner cette focale fixe, (mais vous pouvez la garder si cela vous convient), et pendant 15 jours, vous choisissez un sujet par jour, et vous faîtes 30 photos minimum différentes de ce sujet, pour n’en sélectionner qu’une, celle que vous jugerez la meilleure, la plus proche de votre intention.
Enfin le troisième exercice va être de critiquer vos photos, pas seulement celles faites pendant ces exercices, mais toutes les photos que vous avez envie de critiquer.
La grille de lecture élaborée, ci-après, réalisée avec la participation des membres du club photo Quercy-Images, devrait vous aider à faire cette critique.
Enfin en conclusion, un commentaire du photographe Stephane Berla qui dit :
» Quand je regarde une œuvre, je prends systématiquement trois choses en compte :
Le graphisme ou autrement dit l’esthétisme. Ce n’est pas l’élément le plus important, mais une image bien construite, flatte l’oeil et suscite naturellement l’intérêt. Je porte une attention particulière à la composition, à la répartition des masses et aux lignes directrices.
Ensuite vient la narration. Une image doit avoir un sens, une signification et raconter une histoire. Le choix du titre peut aider à donner un sens particulier à l’image ou attirer l’attention sur un détail;
Enfin l’émotion, cela peut-être l’émotion sur le visage de quelqu’un, mais cela peut être aussi l’aspect nostalgique, touchant ou effrayant d’un lieu, d’une route, d’une atmosphère. A mes yeux c’est l’élément le plus imporant dans une image.
L’idéal est de réunir ces 3 ingrédients dans un même cadre. Le Graphisme, L’Emotion, et la Narration. Là on sait qu’on tient une bonne image. »
🙂